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Numéro 61 - 07 septembre 2016
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C'est en marchant une fois de trop dans cette « coulée verte » rebaptisée Promenade du Paillon, dont l'ancien nom a été habilement escamoté pour des raisons évidentes d'analogies gastro-intestinales, que m'est apparue l'idée des espaces ouverts-fermés. Ces lieux urbains dans lesquels on s'attend voir émerger des espaces de libertés de rencontres, d'échanges, d'inventions, mais qui s'avèrent être contrôlés, liberticides, inhibiteurs. Le récent remplacement de la pelouse naturelle (interdite) en synthétique a détendu quelque peu semble-t-il la « BAC des jardins » (http://www.lesurbainsdeminuit.fr/coups-de-coeur-et-autres-coups?ac_id=4046) mais l'espace ouvert se ferme avant que les rêveurs ne se changent en citrouille... puis les caméras ne nous lâchent pas d'un pouce. Un vrai champ expérimental me direz-vous...

A bien y réfléchir, qu'est-ce qu'un protocole de recherche expérimental sinon...un espace ouvert-fermé ?

Le chercheur met au point, met en scène des souris, des singes et leur donne l'illusion d'une vie normale (nourriture, procréation etc...) pour observer leurs comportements, en déduire des règles, et mettre au point des outils ou des dispositifs ayant pour but ultime l'obtention d'effets escomptés : contrôle de flux, des comportements, vaccins, éradication...

Maintenant quel est, selon vous le rapport entre un parc, un passeport, la cour d'un lycée et le parvis d'une église, au-delà du fait que c'est le sujet de quatre articles de ce numéro 38 des Urbains de Minuit ?

Ils sont tous les quatre des potentiels de changements, de rencontres, de mouvements, d'interpénétrations sociales, intellectuelles, imaginaires. Ce sont des puissances de devenirs et de libertés :

- Le passeport, on ne se l'imagine plus mais c'est, ça reste un outil de circulation des possibles. Tampons illisibles du monde entier, une malle de voyage qui tient dans une poche. Faites-vous confisquer votre passeport et vous sentirez l'étau se resserrer sur vous. (Sonia Grdovic: http://www.lesurbainsdeminuit.fr/coups-de-coeur-et-autres-coups/4384)

- La cour d'école ou de lycée, comme le jardin est le lieux défouloir au sortir des heures de supplices immobiles et nécessaires. Pour les plus jeunes, lieux d'hétérotopies, pleines de cow-boys, d'indiens, de princesses, de chevaliers. Pour les plus âgés, territoires de transitions, de mélanges des corps, découverte des sensualités, de la sexualité réelle ou fantasmée, des limites de la personnalité, déviance assumée ou pas...émois dans les parties sombres .(Amandine Brulée: http://www.lesurbainsdeminuit.fr/coups-de-coeur-et-autres-coups/4403)

- Les églises, pour les croyants, ce sont des lieux de passages ; entre la vie et la mort, l'union et la séparation, le profane et le sacré. Pour les autres, lieux sacrés aussi, mais pour la beauté possible; zone d'hospitalité, de charité. L'église est souvent plus connue pour son dehors (ou son derrière) que pour son dedans: Cour des Miracles où les gens de peu étaient protégés par la puissance symbolique même de l'édifice. Ainsi la pauvreté, la folie, la marge a toujours eu un rapport ambigu avec l'église fascinée elle aussi à son tour. Une sorte d'attirance/répulsion  qui est nécessaire à sa propre légitimation. En d'autres termes, il a toujours fallu des monstres et des gargouilles, au sein même des édifices, pour célébrer en contraste la perfection de Dieu et il faudra toujours des pauvres et des « misérables » pour légitimer leur vocation à la charité. (Niké Diké: http://www.lesurbainsdeminuit.fr/coups-de-coeur-et-autres-coups/4386)

-Pour les parcs, les squares, les promenades, je n'y reviens pas.

Tous ces potentiels de libertés, d'expressions, hétérogénéité deviennent ou tendent à devenir des lieux des objets ouverts-fermés. Objets de libertés potentielles mais qui exigent en contre-partie de plus en plus de contrôle (passeport bio-métrique). Lieux de liberté fermée où l'on est à la merci de de toute contravention, de tout pouvoir arbitraire, pour nous contrôler, nous soumettre, nous apprendre à obéir (cour d'école, parcs etc...). Lieux d'hospitalité, de charité affichée dans le programme mais qui se ferme au monstrueux, à la déviance, à la marge et qui clos l'espace. Église ouverte à la transcendance mais fermée aux monstres qu'elle a elle-même crée et qui met des grilles entre son pouvoir symbolique et le principe de réalité, quitte à parquer la misère derrière les barreaux et en faire l'objet de tous les voyeurismes.

"Le système n’est pas la vie, nous dit Harpocrate, ! Prenons garde de ne pas devenir les victimes passives d’une odieuse mécanique extérieure à nous. Vivre c’est aussi résister !" 

(Harpocrate: http://www.lesurbainsdeminuit.fr/coups-de-coeur-et-autres-coups/4410)

Bonne lecture

F.L.

4 commentaires
Le 2014-06-26 12:09:00 par sonia
pour archive : et les Urbains ça sert aussi à ça garder trace des belles choses détruites de la poésie massacrée de la liberté de vivre http://www.lesurbainsdeminuit.fr/coups-de-coeur-et-autres-coups/72
Le 2014-06-26 12:33:29 par Justin Bridou
Je comprend Trist, Nous sommes victimes du Syndrome de Stockholm , trop habitué au béton , on en vient à remercier l' empire lorsqu'il nous offre une fleur de synthèse .
Le 2014-06-26 01:34:55 par Trist
Cette fois je m'oppose.
Au lieu de l'énième palissade de béton, ils ont ouvert une espace magnifique, de l'air, on respire, on voit le ciel, le vieux et Masséna, les enfants qui jouent dans l'eau tout comme les parents.
Non, cette fois je ne suis pas d'accord. Avec tous les horreurs de goudron gris qui nous renferment dans des limites artificiels, ils ont fait quelque chose. Autre chose.
Le 2014-06-25 12:44:12 par
malheureusement la mécanique est déjà en route ! et de surcroit, bien huilée !
Numéro : 38 -