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Numéro 61 - 07 septembre 2016
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Lettre ouverte à un amant pervers

 

photo : Chantal Ackerman

 

 

Pour Prendre Congé, Monsieur,


Vous êtes venu dans ma maison atelier
un atelier du sujet, où l'identité se construit, crée, étudie, cherche,

déconstruit tout ce qui n'est pas strictement soi,

un atelier de l'individuation avec tous ses outils,

un atelier d'artiste en un mot.

Vous avez eu peur d'y « perdre votre identité ».

On ne perd pas son identité comme on perd ses clés.

L' individu est vivant, il évolue, renonce, apprend, s'adapte, son identité avec lui.

L'individu est plastique, comme les arts du même nom.

Vous dites que vous êtes mort, que c'est sans espoir pour vous.

Bon. Un mort n'ayant pas d'identité vous n'auriez rien à perdre.

Mais comme vous semblez  tout de même y tenir, peut-être avez vous une fausse identité.

Peut-être confondez-vous fonction (fausse identité) et individualité (identité).

Ce n'est pas l' identité individuelle qui est en danger au contact du vivant,

c'est le fonctionnement. Vous ne pouvez pas fonctionner avec moi.

Poussée plus avant, une fausse identité qui ne fait qu'en changer en prenant celle d'un individu individué, celle-là est une imposture. Je n'irai donc pas plus loin, j'épargne un imposteur de plus au Landerneau, qui n'en manque pas.

 

Vous n'aimez pas mais vous avez besoin d'être aimé,

comme un tyran,

comme tous les petits enfants.

Les humains naissent prématurés.

Leur besoin  d'être aimé ne s'épuise pas tant que l'individu n'arrive pas à maturité.

Question de vie ou de mort  longtemps pour ceux qui restent tels qu'ils sont nés :

des êtres néoténiques.

Si c'est une explication ce n'est pas une excuse. L'humain est aussi doté de toutes les capacités physiologiques, psychiques et cognitives pour parvenir à sa maturité, même dans des environnements chaotiques.

Des femmes à leurrer, qui vous aiment parce qu'elles ont besoin d'être aimées,

ou juste d'espérer de l'être,

il y en aura toujours.

Elles constituent votre assurance vie de mâle dominant. C'est facile.

De ce que je connais de votre sexualité, c'est à dire votre aliénation aux corps des femmes strictement utilisés comme fonction,  objets de chair vivante dominée à votre usage, ainsi que  la puissance  de votre pulsion à les réduire à cet état, je ne développerai rien car vous connaissez mieux que moi cette partie de votre perversion.

Du désaveu des spécificités de l'autre nait la négation de l'autre. L'autre n'existe pas, il n'y a pas de différence avec "moi " : pas d'altérité donc pas de sujet, donc  pas d'amour. L'autre n'est jamais apréhendé que comme une somme de fonctions, par vous qui n'êtes que fonctionnement. L'origine de ce désaveu se trouve avec l'aide de l'(auto)analyse psy.

En quoi la multiplicité des femmes vous est-elle utile ? Qu'est ce qui se reproduit  ? qu'est ce qui cherche à avoir lieu de nouveau ? qu'est ce que ça sert en vous ?

Quand vous verrez  le scénario  très honnêtement, avec ce pas de côté, et très précisément  ce que vous y ressentez, alors d'autres scènes se superposeront, des scènes "primitives".  Alors vous saurez pourquoi. Il faudra  le parler. Il s'agit bien plus là de passage à la parole que de passage à la conscience. Seulement alors vous serez libre 1/de tout perpétuer en boucle, sans rien changer  2/de transcender en art donc de déplacer  en partie ou totalement l'expérience dans la création 3/de cesser, donc de renoncer. Pour celui est en capacité de prendre soin de son âme, l'essentiel ne se situe pas dans la fonction ou le confort, mais dans la liberté. Tout le monde ne l'est pas, et le pervers moins que qui que ce soit.

 

 Moi, je suis aujourd'hui au-delà de cet amour de vie ou de mort du petit enfant, ainsi que de ses stratégies pour survivre et jouir.

Il faut dire que j'ai fait la traversée et qu'elle a été sévère.
Je vous raconte la suite, après la répétition ? après vous  et vos frères ?

On commence d'abord par inventer un autre rapport à l'autre. Bien obligé. Puisqu'on sait, et qu'on a décidé de vivre autrement, de désirer autrement. C'est  effrayant au début. C'est très bizarre. C'est comme d'arriver sur une nouvelle terre , sauf que la nouvelle terre c'est soi-même. Plus de repères. Mais on sent qu'on est bien plus juste sans, qu'avec les vieux repères, toujours un peu utiles, mais plus adéquats.
On n'a rien à craindre et pourtant on y va  prudemment, lentement (il faut dire qu'on n'est plus animé par le même moteur) en ouvrant grands les yeux et les oreilles, et en fermant un peu sa gueule. On fait. Des choses absolument nouvelles parce qu'elle se font dans un tout nouveau rapport à l'autre. De belles choses.

En affection, allégresse, et confiance.

 

 

Sonia Grdovic

5 commentaires
Le 2013-06-10 11:05:23 par angélique
dans cette lettre ouverte à un PN on devine une volonté d'expliquer, d'éduquer... Comme je reconnais là l'être qui ne sait aimer et surtout pas lui.. Qui manipule, rassure puis brise.; vole et absorbe les couleurs de l'Autre.. Et jadore le 2ème round.. là où tu te réveilles..t'éveilles et lui parles de toi et de traversée et des nouveaux rivages.; la lumière est au bout.; très beau.. très fort.. Merci à toi Nb : un Procès Verbal pour un Pervers Narcissique cela se fête !
Le 2013-06-13 23:14:59 par TheKingdom
Les femmes ont un vagin et les pénis ont un homme. :-)
Le 2013-06-14 13:35:20 par valdi
Ta "lettre ouverte" m'a bien réjoui. Cette intransigeance rimant avec clairvoyance, c'est vraiment toi, brute de fonderie... Pas de pardon!...



La distinction que tu fais entre fonction et individualité (je serais plus dur encore en disant "être") me semble l'une des clés, et non la moindre, révélant la pertinence ou l'inanité du quotidien. Le plus modeste des objets est un être à part entière ("objets inanimés..."); encore faut-il être porté à considérer cette dimension, et inversement, quiconque, par conformisme social ou médiocrité intrinsèque, consent à se réduire à une fonction, perd sa qualité d'être, ce qui est presque une damnation. Par ailleurs, l'amour, s'il existe, enseigne, me semble-t-il, avant tout l'humilité.
Le 2013-06-18 16:17:18 par Mélusine
Bravo pour le constat, sublime de justesse ,mais un pn ne renonce jamais ( illusion ! c’est un grand malade ),la seule issue est de fuir …pour sa propre santé mentale …vers la vraie vie ….l’être et non l’avoir , l’allégresse et la confiance ,la « liberté »,l’amour si on le trouve,en tous cas les belles choses oui,la lumière est là ..définitivement !

Ps Je découvre ton site
Le 2013-06-21 20:59:24 par Non mais
Quelle heure est il
Numéro : 13 -