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Numéro 61 - 07 septembre 2016
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Confine del Corpo Experience 2/ aux abattoirs de Nice : ambiance

Photo Zacloud octobre 2015 Abattoirs

 

Sang 9 ou vieux, c’est toujours du sang ! 

Entrez dans cet espace et vous êtes en alerte… qu’est-ce qui cloche ?
Il y a une sorte de guérite, et un gardien. Entrée filtrée. Interrogation sur l’identité et ce que l’on vient faire ici. Sans l’amabilité qui, au moins, siérait : personnel municipal avec cette espèce d’arrogance particulière et ce regard qui toise. C’est toi, habitant(e) de la ville, qui les paie pour le service de tous, mais s’instaure un rapport de domination. Tu es suspect(e), inutile, tu es là en trop… C’est tellement mieux VIDE, avec eux seulement.
Ensuite il y a le choc de l’immense espace de la halle, avec la laideur de ses murs, intouchables pourtant, les gadgets mobiliers jaunes et pesants qui ont coûté une fortune, paraît-il, fantaisies de Sophie Duez, peut-être ? Un univers pourvu, en son plafond, d’un système de rails et crochets

Photo Zacloud octobre 2015 Abattoirs

d’où l’imagination tire d’hallucinantes images de danse macabre… carcasses flottantes entraînées en un ballet circulaire sans fin et peut-être emballées comme chevaux fougueux, en révolte… enfin, on voudrait bien, en révolte. Autres découvertes : les pièces attenantes à la halle. En fait des frigos, puant encore de puanteur de viande fraîchement morte, au sol suspect de taches incertaines qui seraient bien de sang. LE CHOC. On ne peut pas ne pas penser que tous les endroits d’extermination massive sont nés d’un même modèle. Et l’on sent monter l’envie que tout se recouvre. Mais de quoi ? Mais comment ?

C’est l’espace pour Confine del Corpo Experience 2… Manifestation interdisciplinaire mêlant exposition, installations, projections, performances, danse, chant...

Là vont s’affronter des systèmes que d’aucuns pensent compatibles, ce qu’à mon avis, ils ne sont pas. Les protagonistes : les artistes, Urbains de Minuit, invités, et danseurs/ses de la Cie Antipodes, cette dernière ayant la particularité d’être résidente en ces lieux. Et la mairie de Nice.

Deux logiques.

Qu’est-ce qui caractérise les Urbains, avant même la création artistique ? À mon sens la volonté farouche d’être libres, autant que faire se peut dans cette société, ainsi que des positionnements comme citoyens de la ville de Nice sur l’administration et les choix municipaux, et ensuite, plus globalement, sur la gouvernance du pays et les événements internationaux. Ainsi contrairement à ce que certain(e)s pensent, il ne s’agit pas seulement, pour elles et eux, d’accrocher leurs œuvres ou d’être en monstration mais d’être actrices et acteurs d'abord de leur propre vie. Évidemment (et fort heureusement) ils, elles ne sont pas les seul(e)s, simplement ils se nomment.


Acteur de sa propre vie veut dire autonome, libre de s’organiser, de se gérer. Là, une autre logique règne. La logique ADMINISTRATIVE. La période d’installation est propice au choc « des cultures ». Tout doit être validé. Les interdictions sont légions. En fait, TOUT EST DÉJÀ RESTREINT. Ce qui reste est soumis à un contrôle strict. Matériel, espace et temps, tout est mesuré. L’horaire est fixé, non adaptable. Ce qui a été modifié à la marge sera fixé à son tour. Pas de fantaisie, hein ! La responsable de la Cie Antipodes martèle les consignes dont on la martèle. Rôle ingrat. On sent la tension. Elle joue sa convention de résidence.

Pas de débordement…

Mais un tel événement dont la marque est de sortir du temple dévolu des galeries d’art, et du marché de l'art, est par essence un débordement : espace hors normes, œuvres hors normes, corps et aptitudes corporelles hors normes, voix hors normes. Pourtant la norme règne. Étrange univers dédié aux arts et à la culture mais entravé.

Les artistes sont ici des êtres mineurs, infantiles, que des « anges » administratifs pilotent. « 16h45 …..Attention, tout le monde dehors à 17h », c’est le gardien qui passe pour fermer. Alors l’artiste doit laisser ce qui est en cours pour le lendemain. Et le gardien ferme les grandes et lourdes portes…
 Tiens, l’éclairage des œuvres est fait très progressivement. Trop ? Oui, trop peut-être, si bien qu’au soir du 26, quand la nuit tombe, on s’aperçoit que deux œuvres n’ont pas de projecteurs… Trop tard ! Plus de matériel… ? Mais de toutes façons pas assez de puissance, dit le régisseur. Vrai ? Faux ? Va-t-en savoir. Les maîtres du jeu, ce sont eux. Crispation, sensation d’impuissance et forte contrariété de ce qui est infligé, là, à une personne qui a beaucoup travaillé pour le festival des Urbains de Minuit, dont cette exposition fait partie.
Ah ! Qu’en est-il de la fête, avant la fête et de l’après ? Je vous laisse jeter un œil sur les consignes (attention nous respectons dans cette retranscription le style dressage de chien) : 1) aucune cigarette dans la halle, frigos, etc.  le système incendie est très sensible. 2) le décrochage doit se faire le jeudi soir avec en priorité la halle nord. S'il reste EVENTUELLEMENT une oeuvre ou 2 elles peuvent être retirées le vendredi matin. EN AUCUN CAS, on ne doit considérer le vendredi comme un jour de démontage. DONC les artistes sont priés de décrocher le jeudi soir.(En plein jour de la St Narcisse, clôture du festival avec nombreux événements programmés... note de l'auteur) 3) Pas d'alcool au bar EN AUCUN CAS (pas d'artistes bourrés... ) 4) il nous faut des cendriers d'extérieur et des poubelles sauf si on veut ramasser les détritus en fin de soirée. 
Comment avons-nous réussi précédemment, lors de Confine del Corpo Expérience 1, à Sanremo, à nous en sortir tout seuls, sans contrôle,  à nous auto-organiser ? Comment ?


La soirée se déroulera donc sans vin... L'after, dehors fut... différent.

Trois cents visiteurs. Succès. Une très belle deuxième exposition. Commissaire Sonia Grdovic (artiste plasticienne).

Beaucoup de curiosité en particulier pour les œuvres très directement inspirées par le lieu. Des prestations réussies et appréciées pour leur qualité et leur diversité. Mais un final dérangeant où, surprise, seule la Cie Antipodes se présente comme organisateur de la manifestation laissant les Urbains sidérés… mais c’est un autre problème.

Bef, un vent libertaire a soufflé sur la halle ! Le vin est un détail… oui on peut s'amuser, exposer, danser, faire de la poésie, s'INSURGER sans vin, mais toute cette gestion ultra autoritaire et administrative du lieu… on a beau savoir qui est en face de nous, ça fait bouillir le sang… 9, bien sûr.
Supporter ce manque de liberté, ce cadre si étroit pour la création qui est ou devrait être un pied de nez, ou plus si affinité, à tous les pouvoirs, est un exercice qui n’est pas sans laisser de marques.

Peut-on être Urbains en milieu surveillé ? Se pose la question.

Narki Nal, aux Urbains de Minuit, et aux  autres

1 commentaires
Le 0000-00-00 00:00:00 par Albert
Très bonne description de ce qui s'est passé ... c'est bien de lire cette narration qui nous donne le sens et l'esprit de ces jours, et serai tant mieux aussi d'avoir d'autres avis
Numéro : 58 -